samedi 13 avril 2019

LES COURS D'HERVÉ THIS / LES ROUX , LIAISONS ET VELOUTÉS

Le thème du mois :

Ce mois-ci, nous nous intéressons aux roux, en focalisant sur deux citations :
1. U. Dubois, p. 50. "pour obtenir des sauces bien liées, la farine doit être bien cuite".
2. 1886 : La petite cuisine des ménages (anonyme), Emile Guérin ed., Paris (sd, vers 1886), p.
24 : une sauce poivrade est faite d’un roux, avec du vinaigre… mais ne trouve-t-on pas
ailleurs que le vinaigre fluidifiait les sauces liées à la farine ?

Pour nos expériences, nous décidons :

1. de comparer le même velouté avec un roux léger ou avec le même roux cuit de façon plus
poussée
2. de comparer ces veloutés à celui que l'on obtient si l'on ajoute du vinaigre plutôt que de l'eau.
On commence par observer que la profession utilise 60 grammes de roux au litre pour des
béchamels un peu épaisses, 80 grammes par litre pour les bouchées à la reine, 100 grammes au
litre en charcuterie, et jusqu'à 125 grammes au litre pour de la crème pâtissière.
Pour nos expériences, on utilise autant de beurre de que farine, et l'on cuit légèrement le roux.
Puis on le divise en trois.
1. On ajoute alors 450 grammes d'eau dans le premier tiers du roux, et l'on cuit chacun jusqu'à
épaississement maximal. On observe que le roux pas trop cuit (couleur crème) épaissit comme on
est habitué à le voir s'épaissir.
2. On cuit le deuxième tiers du roux initial alors jusqu'à disparition des bulles et apparition d'une
couleur brune. Puis on ajoute la même quantité d'eau que dans le premier velouté : l’épaississement
est bien moindre.
3. Enfin, dans le troisième tiers du roux initial, on ajoute autant de vinaigre d'alcool blanc (8°,
Fuchs) qu'on avait ajouté d'eau dans les deux précédents roux, et l'on obtient un épaississement
presque analogue à celui du roux léger, avec un aspect plus blanc, plus brillant et plus engageant.
On observe :
- la farine insuffisamment cuite dans un roux fait un goût fade et « farineux » ; les livres de cuisine
du siècle dernier discutent cette question très abondamment, avec des querelles importantes entre
les professionnels
- pourtant, des recettes d’oeufs meurette se font avec des beurres maniés (où la farine est malaxée
avec du beurre, sans cuisson, en vue d'une dispersion plus facile (voir la discussions sur la
percolation, dans ce même compte rendu), et pas des roux
- quand un roux est cuit brun, la disparition des bulles (de vapeur) est le signe que toute l'eau du
beurre (18 % environ) et de la farine a été évaporée, de sorte que la température peut augmenter
- certains cuisiniers ont résolu la question en n'utilisant pas de la farine, mais des végétaux comme
es petits pois ou les lentilles… qui apportent de l'amidon ; en revanche, certains légumes mixés
sont seulement à l'origine de particules solides, sans amidon.

Illustration: A gauche, le velouté roux léger + vinaigre (poivrade). Au milieu le velouté classique
au roux léger. A droite, le velouté au roux brun

3- L'acclimatation de la cuisine note à note
3.1. On commence par une démonstration de l'usage de carraghénane kappa. Il s'agit d'une poudre
blanche, qui provenait de la Société Louis François.
Les gels obtenus avec le carraghénane kappa :
- sont élastiques, brillants et transparents.
- sont résistants à la chaleur, jusqu’à un peu plus de 65 °C. Ainsi, on peut réaliser des gelées,
crèmes ou mousses chaudes !
- résistent à la présence des enzymes d'ananas (broméline), de papaye (papaïne), de figue (ficine),
de cassis… Contrairement à la gélatine, qui fait des gels instables ou dont le goût est modifié par
l'ébullition, les carraghénane kappa permettent de faire des gels à partir des jus frais.
Nous faisons l'expérience de produire un gel en ajoutant une cuillerée de carraghénane à huit
cuillerées d'eau. On chauffe… et l'on obtient la gélification.

3.2. Divers autres produits :
Daniel Arrault s'est procuré des polyphénols auprès de la Société Iqemusu : le prix était de 14
euros les 100 g livrés.

▪ On peut se procurer des huiles à l'odeur de truffe (artificielle) chez Pebeyre : le produit a pour
nom Truffarome, et on trouve des reproductions de truffe noire ou blanche.

▪ Pour des recettes de « sauce wöhler », voir :
https://sites.google.com/site/travauxdehervethis/Home/applications/des-applications-de-deuxtypes/
applications-technologiques/cuisine-note-a-note/recettes-note-a-note/sauce-woehler ou encore
https://www.pierregagnaire.com/pierre_gagnaire/travaux_detail/51

▪ Le saccharose n'est autre que le nom du composé qui fait 99,9 pour cent du sucre de table blanc ;
et le fait qu'il soit blanc est la preuve de sa très grande pureté.
Non, il n'est pas vrai que le saccharose renferme du glucose et du fructose, mais il est vrai que,
quand il est chauffé en milieu acide (par exemple), les molécules de saccharose se dissocient en
deux molécules dont une est une molécule de glucose, et l'autre une molécule de fructose. Le
glucose a une saveur douce, et le fructose a une saveur sucrée
.
▪ Il existe différentes qualités de gélatine, et le fait qu'elle soit en poudre ou en feuilles n'a rien à
voir avec leur « goût ». Pure, la gélatine n'a pas de goût, et c'est la présence d'impuretés qui donne
du goût au produit. Autrement dit, de la gélatine proprement extraite est sans goût.
D'autre part, les gélatines de poisson de mers chaudes, ou de mers froides, ou de porc jeune, ou âgé,
ou de boeuf, etc. sont toutes différentes. Elles n'ont pas exactement les mêmes propriétés à la
gélification.

▪ Les additifs sont des composés qui sont évalués, très encadrées du point de vue réglementaire, et
dont plusieurs sont utilisés en cuisine. Certes, les cuisiniers ne font guère usage de conservateurs,
mais les agents gélifiants sont dans la liste autorisée et testée.
On aura intérêt à ne pas croire n'importe quel imbécile qui dit que les additifs sont dangereux pour
la santé, en n'oubliant pas que la question n'est pas le danger, mais le risque… et que l 'on peut
mourir d'un choc osmotique en buvant trop d'eau.


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