samedi 13 avril 2019

LES COURS D'HERVÉ THIS / LES LIAISONS A L’ŒUF DUR

Le thème du mois :

2.1.Les liaisons à l’oeuf dur.
Peut-on lier à l’œuf dur ? On trouve dans La suite des dons de Comus (t1, p. 78) une « sauce au Petit
Maître » :
« Faites infuser deux gousses d’ail dans une chopine de quint-essence, ou consommé, avec une poignée de cerfeuil en branche. Passez à l’étamine. Pilez dans le mortier deux jaunes d’oeufs durs, avec quelques cœurs de laitue blanchis, et même presque cuits, hachés auparavant. Mettez le tout dans une casserole avec deux pains de beurre, deux tranches de citron, un peu de poivre concassé. Tournez le tout sur le feu ».
D'autre part, on trouve des « sauces tartares », qui sont comme des mayonnaises, mais au jaune d’œuf dur.
1953 : Curnonski, p. 83, à propos de sauce tartare : « Prélever 4 jaunes d’oeuf durs, 1 jaune d’oeuf cru
(...). Il faut remarquer que cette sauce doit s’apprêter au dernier moment, car elle se
décompose rapidement, l’oeuf cuit n’ayant pas la résistance du jaune d’oeuf cru ».
1958 : Raymond Oliver, La cuisine pour les hommes, 1958, Bibliothèque pratique des familles, Paris,
p.80 : « Sauce tartare. C’est une mayonnaise à laquelle on a incorporé quelques cornichons,
des câpres et des fines herbes ».
SD : La cuisine à l’usage des familles, par la Société des cuisiniers de Paris (le livre de la profession),
Eyrolles, Paris (sans date), p. 102 : « Sauce tartare. Ne pas préparer cette sauce longtemps à
l’avance : elle se décomposerait, les jaunes d’oeufs cuits n’ayant pas la force de résistance
des jaunes crus ».
Pour nos expérimentations, on commence par observer qu'un œuf dur se cuit 10 minutes dans l'eau
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bouillante. Pour des temps plus longs, le blanc devient caoutchouteux, le jaune devient sableux, et
un cerne vert accompagné d'une odeur soufrée se dépose à la surface du jaune. C'est pour prendre
le contre-pied d'un œuf aussi médiocre qu'ont été introduits par H. This les « œufs parfaits »,
aujourd'hui très à la mode ; à noter que le nom a été remplacé par « œuf à xx °C ».
On observe que le cerne vert des œufs trop cuits résulte de la dégradation des protéines, lors des
cuissons excessives, qui s'accompagnent de la libération du gaz nommé hydrogène sulfuré, un gaz
toxique (mortel), à l'odeur d’œuf quand il est en petite concentration, d’œuf pourri quand il est plus
concentré ; à plus forte concentration encore, on ne le sent plus, ce qui le rend particulièrement
dangereux.
On invite donc à militer contre les œufs durs à cerne vert, notamment dans les sandwicheries.
Pour nos expériences, on commence par faire trois œufs durs bien cuits, mais sans excès : ils sont
mis dans l'eau froide, qui est chauffée, et l'on compte 12 minutes après l'ébullition.
Puis on commence par mélanger 2 cuillerées d'eau et 1 jaune dur. On ajoute de l'huile goutte à
goutte en fouettant, comme pour une mayonnaise : une émulsion se fait bien.



Cette sauce (à l'exception du fait qu'on a utilisé de l'eau pure et non du vinaigre) est une « sauce
tartare ».
A quoi bon faire la sauce tartare ? On observe que le jaune d’œuf dur a un goût différent du jaune
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cru, et que la sauce tartare est donc différente de la sauce mayonnaise.
Puis on essaie de reproduire une sauce hollandaise : dans une casserole, on chauffe en fouettant de
l'eau et du jaune d’œuf dur, puis on ajoute de l'huile (on n'avait pas de beurre) en fouettant, et l'on
obtient une sauce chaude émulsionnée qui s'apparente à la sauce hollandaise.
Enfin, on essaye de faire une émulsion froide à partir de blanc d’œuf dur : on écrase un blanc d’œuf
dur dans deux cuillerées d'eau, puis on ajoute de l'huile en fouettant. L'émulsion se fait bien, même
si l'on conserve des particules, dues au fait que nous ne disposions pas d'un mortier et pilon pour
bien mêler le blanc d’œuf à l'eau (le travail a été fait au fouet).

2.2. La comparaison des solutions d'acide citrique et de jus de citron.
On dispose de citron, d'acide citrique et d'acide tartrique, et l'on cherche à savoir si un test sensoriel
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distingue les trois produits.
Une participante, fille de pharmacien, signale que sa mère utilisait de l'acide tartrique au lieu du jus
de citron.
On prépare alors des verres avec soit jus de citron (filtré, sans pépin), soit de l'acide citrique dans
l'eau (même acidité perçue).
Le premier dégustateur fait un test triangulaire yeux fermés et nez bouché : il fait une erreur, et deux
reconnaissance juste.
Le deuxième dégustateur fait encore le test, et reconnaît bien les différences : le jus de citron est un
goût plus « plein » (mais la différence est faible)
Il reste à faire le même test, mais en dilution dans un aliment (sauce) : les lecteurs de ce compte
rendu sont invités à faire ce test.
Puis on organise une comparaison tartrique/acide citrique, toujours avec un test triangulaire.
Trois dégustateurs différents reconnaissent la différence. Soit pour des raisons de saveur différente,
soit parce que la solution d'acide citrique est plus « citronnée », soit parce que, avec l'acide
tartrique, la sensation d'acidité semble apparaître plus lentement.
A noter que les deux acides ont une légère astringence.


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