lundi 8 février 2021

Le thème expérimental du mois : peler les tomates

Les livres de cuisine prescrivent, pour peler des tomates, des pratiques différentes : avec ou sans bac d’eau froide, des temps variés (5, 10, 15, 20, 25 secondes), l’élimination préalable du pédoncule éventuelle, la préparation des tomates avec notamment la formation d’une croix, au couteau, avant de les plonger dans l’eau bouillante.

En restauration collective, le traitement se fait en bac à trous et au four à 130 °C, avec vapeur.

Ces tomates pelées sont plus agréables dans une salade, dans une sauce (pas de particules rouges), etc.

Et l’on a comme critère :

- que la tomate reste crue (avec sa consistance et son goût de cru)

- que la peau se détache facilement

- que la peau n’emporte pas de pulpe

- que l’ongle passé sur la tomate pelée n’emporte pas de pulpe

La cuisson se fait à l’eau non salée, sans bicarbonate de sodium.

Pour ce qui suit, on numérote des expériences différentes :

1. Pour nos premières expériences, une série de tomates rondes est utilisée. On ignore leur maturité, les conditions de leur culture, et l’on envisage des répétitions, afin de savoir si la variabilité de la matière première est importante… mais on verra que la réponse est négative.

Pour ces premières tomates, on les plonge dans l’eau bouillante, on les laisse un nombre de secondes déterminé à 1 seconde près, et on les pose à l’air libre, sans eau froide pour commencer.

Les résultats sont :

Tomate crue La peau s’enlève difficilement.

A l’économe, on enlève trop de pulpe. Certes, on pourrait utiliser un économe spécial, mais le travail est plus important que quand on peut peler.

Cuisson 5 s c’est presque comme si l’on n’avait pas cuit : épluchage difficile. L’emploi de l’économe est facilité, mais il reste trop de pulpe.

Cuisson 10 s Presque comme pour 5s, mais le pelage est plus facile, sans emporter de pulpe ; on fait des lanières plus larges, et l’expérimentateur professionnel déclare : « je ne pensais pas que ce serait aussi simple avec seulement 10 s ».

Cuisson 15 s Le pelage est facilité, et il peut même se faire avec les doigts (ce qui n’était pas possible avec 10 s). Un tout petit peu de pulpe part avec la peau ; très peu de pulpe dans le test à l’ongle.

Cuisson 20s du jus sort, mais c’est presque comme pour 15 s, avec peu de pulpe sur la peau ; un peu de pulpe part dans le test à l’ongle

Cuisson 25 s Cette fois, de la pulpe avec la peau en quantité qui est jugée excessive.

Cuisson 40 s La peau éclate après 30 s de cuisson. Après cuisson, la peau part toute seule, sans chair, mais le test à l’ongle donne de mauvais résultats.

L’incertitude sur la mesure est de 1 s environ.

On voit que, comme annoncé, la variabilité entre les tomates est inférieure à la différence des effets du traitement, et l’on se réserve de confirmer cela par d’autres expériences (voir plus loin).

2. Pour ces premiers tests, on n’avait pas fait de croix. De ce fait, on fait le test de la croix : au couteau, une croix est faite à l’opposé du pédoncule, qui est enlevé. On plonge la tomate dans l’eau bouillante, et, cette fois, on la sort quand, comme prescrit, les pointes de la croix se soulèvent.

Là, on mesure que le temps de séjour dans l’eau bouillante est de 53 s, bien supérieur à ce qui donnait les meilleurs résultats précédemment. Pour autant, le résultat reste admissible : la tomate se pèle bien, avec un peu de chair toutefois qui part avec la peau, et un test à l’ongle qui ne passe pas.

On conclut que cette méthode est moins bonne que la cuisson entre 15 et 25 s.

3. Avec deux tomates rondes encore, on teste l’effet éventuel d’un refroidissement dans de l’eau au sortir de l’eau bouillante : on compare deux tomates que l’on cuit sans croix, en laissant le pédoncule, à 20 s : elles sont plongées en même temps, sorties en même temps, et une tomate est placée dans l’eau froide, tandis que l’eau est laissée à l’air.

On examine les tomates quand la tomate à l’air n’est plus que tiède/froide.

- cette tomate refroidie à l’air se pèle bien, avec très peu de pulpe qui part avec la peau, et très peu de pulpe sur l’ongle tout petit peu enlevé sur l’ongle ;

- la tomate refroidie à l’eau (qui ne flottait pas dans l’eau) se pèle très bien, avec moins de pulpe sur la peau, et un test à l’ongle qui donne des résultats différents, avec plus de purée à un endroit plus sombre, et pas sur le côté plus clair.

Ainsi, on recommande le refroidissement à l’eau : les deux tomates se pèlent bien mais le résultat est plus apprécié avec le trempage dans l’eau.

4.Pour voir la différence éventuelle selon les variétés, on reproduit la a première expérience avec des tomates allongées, qui sont ébouillantées, puis mises à l’eau.

Tomate crue Très difficile au couteau, et fort gaspillage à l’économe.

Cuisson 10 s La tomate flotte, contrairement aux tomates rondes. La peau part, mais pas facilement, et elle se rétrécit progressivement en pointe. Il n’y a pas de pulpe avec la peau, et l’ongle n’enlève rien. Au total, c’est quand même difficile de peler.

Cuisson 20 s Elle flotte aussi, peu de pulpe sur la peau, l’ongle enlève un peu et le pelage se fait facilement.

Cuisson 30 s Elle flotte, mais le pelage enlève de la pulpe, et le test à l’ongle est mauvais ; le pelage peut se faire à la main

Cuisson 40 s Elle flotte, mais le résultat est mauvais (pulpe cuite sur trop d’épaisseur)

Cuisson 50 s Elle flotte, mais le résultat est également mauvais.

5. On fait maintenant tout une série de tomates toutes différences, que l’on passe pendant 20 s à l’eau bouillante, avant de les mettre dans l’eau froide

Une très grosse tomate (coeur de boeuf) flotte ; la peau s’enlève bien, avec un tout petit peu de chair, très peu sur l’ongle, bon résultat

Une tomate verte flotte moins, et s’épluche très bien aussi, même résultat du test à l’ongle.

Une grosse tomate jaune flotte, puis tombe au fond ; la peau s’enlève très mince, sans pulpe sur la peau, un peu sur l’ongle.

Une tomate noire tombe ; elle s’épluche bien, avec des peaux transparents, sans pulpe, mais le test à l’ongle donne un résultat un peu moins bon que précédemment.

Une tomate allongé tombe, s’épluche bien aussi, comme les deux dernières, un peu de pulpe sur la peau, résultat du test à l’ongle comme la verte et la rouge.

Une coeur de boeuf allongée : très peu de chair sur la peau, comme la grosse rouge, très peu d’ongle.

Finalement, ce test montre la très grand homogénéité des résultats, malgré la grande diversité des tomates, comme annoncé plus haut.

Centre International de gastronomie moléculaire AgroParisTech-Inrae

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